Dans un récent rapport, le Comité catholique contre la faim et pour le développement (CCFD) rappelle
qu’à eux seuls les avoirs volés par les chefs d’État des pays du Sud s’élèvent à près de 200 milliards de
dollars. Pour le seul continent africain, « les actifs volés et détenus dans les comptes en banque à
l’étranger équivalent à plus de la moitié de la dette externe du continent », estimait en 2003 la
Commission des communautés européennes. Dans le peloton de tête des pilleurs de biens publics, on
trouve par exemple le chef de l’État ivoirien Houphouët Boigny, décédé en 1993 après avoir accumulé
entre 7 et 11 milliards de dollars. « Le pillage des richesses des pays du Sud s’est opéré avec la
complicité ou à l’initiative des gouvernements et des entreprises des pays du Nord », souligne le CCFD.
Durant la guerre froide, les pays occidentaux ont entretenu des régimes amis sans se soucier un instant
des détournements de fonds. Les pays du Nord rechignent toujours à lutter contre les paradis fiscaux
qui sont pourtant la destination première de l’argent illégal. Il s’agit de ménager les régimes amis. C’est
le cas par exemple de la Guinée équatoriale, où Washington préfère sécuriser la présence de ses
compagnies pétrolières que s’inquiéter du détournement de la rente par le clan au pouvoir, ou du Congo
Brazzaville, que des banques françaises ont aidé à camoufler des fonds détournés. Signe de mauvaise
volonté, seulement 4 milliards de dollars ont été restitués et 2,7 milliards gelés, sur le total des sommes
placées par des dictateurs dans des banques occidentales. Depuis quelques années, les sociétés
civiles du Nord comme du Sud se mobilisent pour lutter contre cette connivence. C’est dans cette
logique que trois organisations, Sherpa, Survie et la Fédération des Congolais de la diaspora, ont
déposé à Paris une plainte contre X visant des chefs d’État africains accusés de posséder en France
des biens immobiliers financés par des détournements d’argent public.