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Histoire des mouvements sociaux

Quelques repères théoriques

par Jean-Pierre Michiels, janvier 2010

Qu’est-ce qu’un mouvement ?

Je définirais la notion de mouvement comme un groupe d’hommes et de femmes qui agissent ensemble pour défendre une cause (lutter contre l’exploitation, pour leur émancipation ; revendiquer un statut ; s’opposer à un projet de loi…) ; c’est donc aussi l’ensemble des luttes que mènent ces luttes que mènent ces hommes et ces femmes pour atteindre leurs objectifs et qui les soudent, leur donnent une conscience collective (appartenance à un groupe plus ou moins important), forgent leur culture,… ; c’est encore l’ensemble des institutions que se donnent ces hommes et ces femmes pour favoriser leurs actions, tisser des liens de solidarité,… (syndicats, partis politiques, mutuelles, coopératives, associations,…).

Il y a une multitude de mouvements : mouvement ouvrier, mouvement syndical, mouvement socialiste, communiste, mouvement mutuellistes,… mais aussi mouvement étudiant qui regroupe les étudiants qui s’associent pour faire valoir leurs droits spécifiques, protester contre une réforme, un projet de loi, mais aussi leurs associations, syndicats,… Il y a le mouvement de la paix qui rassemble des citoyens qui s’opposent à la guerre, aux armements (missiles), qui organisent pour cela des manifestations, des pétitions, se regroupent de façon formelle (CNAPD) ou informelle au sein de comités locaux qui n’ont parfois qu’une vie éphémère. Vous avez peut-être entendu parler du mouvement indien en Amérique latine, ou du mouvement des Chiapas au Mexique : ce sont des peuples qui luttent soit pour leur autonomie, leur indépendance, la protection de leur environnement,… parfois les armes à la main.

Il y a des mouvements très sectoriels : on a parlé du mouvement des infirmières, des enseignants, récemment du mouvement des agriculteurs, il ya quelques années on a parlé aussi du mouvement des prostituées qui revendiquaient un statut, une protection légale.

Aujourd’hui, on parle beaucoup du mouvement des sans papiers, les demandeurs d’asile qui souhaitent obtenir une régularisation qui leur permettent de travailler et de cesser de vivre dans la clandestinité ; ce mouvement inclut évidemment celles et ceux qui les soutiennent, les organisent, font preuve de solidarité. Et l’on touchera tout à l’heure un mot sur le mouvement des chômeurs.

Vous comprenez que le terme « mouvement social » englobe une multitude de luttes globales ou partielles. Nous nous cantonnerons aux luttes du mouvement ouvrier qui ont marqué le cours de l’histoire et qui ont permis des changements notables dans notre vie.

Qu’est ce que le mouvement réel ?

Restons encore un peu sur le mouvement. Une notion importante pour comprendre le sens de l’histoire des mouvements sociaux : c’est ce que Marx appelait le mouvement réel. Le mouvement réel englobe l’ensemble de la société. Il recouvre le mode d’existence (par mode d’existence, on entend le travail, le logement, la mobilité,…), la manière d’être (pour moi, cela inclut entre autres les règles que l’on se donne pour vivre ensemble), le développement des sociétés (le progrès de la médecine (longévité), le développement des technologies (conditions de travail), le développement de la pensée (notamment la culture).

Il faut donc partir d’une observation précise de la société réelle, c’est-à-dire de la société telle qu’elle est et non d’une société imaginée, rêvée ou supposée être. Cette observation de la société telle qu’elle est pour en comprendre l’évolution : c’est ce qu’on appelle dans la terminologie marxiste, le matérialisme historique. Matérialisme à la différence de l’idéalisme qui considère que les idées précèdent le réel alors qu’avec le matérialisme, c’est le réel qui influence les idées ; et historique parce que Marx considère la société dans son évolution. Pour lui rien ne reste figé ; tout évolue, tout bouge : c’est le mouvement.

Cette conception matérialiste (vous avez bien compris que ça ne comprend pas seulement les aspects matériels comme l’argent ou les biens de consommation) est évidemment très importante pour votre propre action. Il ne suffit pas en effet d’avoir la conviction intime, de penser très fort qu’il faudrait faire grève, encore faut-il que les conditions (c’est-à-dire le réel) le permette.

Partant de cela, il y a un deuxième repère théorique à souligner : celui de la classe sociale.

Qu’est-ce qu’une classe sociale ?

« On appelle classes de vastes groupes d’hommes qui se distinguent par la place qu’ils occupent dans un système historiquement défini de production sociale, par leur rapport (la plupart du temps fixé et consacré par les lois) vis-à-vis des moyens de production, par leur rôle dans l’organisation sociale du travail, donc, par les moyens d’obtention et l’importance de la part des richesses dont ils disposent. Les classes sont des groupes d’hommes dont l’un peut s’approprier le travail de l’autre, à cause de la place différente qu’il occupe dans une structure déterminée, l’économie sociale. »
Le terme de « classe » n’est pas propre à Marx ; il se retrouve déjà dans le droit romain. L’un des grands mérites de Marx est d’observer l’évolution de la société capitaliste et la manière dont la bourgeoisie s’est affranchie de l’ancienne classe dominante, la noblesse ; il observe comment cette bourgeoisie devenue à son tour dominante, construit la société pour assurer son hégémonie (son pouvoir) sur l’autre classe importante quantitativement du fait de l’industrialisation, le prolétariat ou la classe ouvrière. Importante mais dominée car elle ne détient pas les moyens de production ; elle ne peut vivre qu’en vendant sa force de travail aux capitalistes. A l’époque, Marx distingue d’autres catégories qui interviennent dans le processus de production mais ne sont pas directement liés à la production de la valeur ajoutée : notamment les employés qui ne sont pas assimilés à la classe ouvrière même si leur exploitation est évidente. Avec le temps, les conditions de vie et de travail rapprochent les deux catégories mais l’antagonisme entre cols bleus et cols blancs a la vie dure.

Pour Marx, l’existence objective d’une classe (la classe en soi) ne suffit pas pour qu’elle soit consciente d’elle-même (la classe pour soi). Pour cela, il faut qu’elle acquière la conscience commune d’une lutte à mener.

Qu’est-ce que la lutte des classes ?

Cette expression n’est pas non plus le seul fait de Marx. Au XIXe siècle, des historiens libéraux y font référence considérant cela comme un mode normal de vie d’une société et non comme un dysfonctionnement de celle-ci, ce que certains auraient tendance à considérer aujourd’hui pour en nier la pertinence. Dans la mesure où il existe toujours des positions hiérarchiques dans le processus de production impliquant des intérêts antagonistes, il ne peut qu’y avoir conflit, lutte. Et cela à toutes les époques de l’histoire de l’humanité : les esclaves contre les plébéiens et les patriciens dans l’Antiquité, les serfs contre les seigneurs au Moyen-Age, les bourgeois contre la noblesse aux XVIIIe et XIXe siècle, les prolétaires contre la bourgeoisie ensuite.

Les notions de classes et de lutte des classes n’impliquent pas que les moyens de lutte aient été et soient homogènes. Rapidement, deux courants eux-mêmes traversés par des conceptions différentes, vont se démarquer au sein de la classe ouvrière. Schématiquement, un courant réformiste qui va privilégier l’action parlementaire et viser à un changement de la société grâce aux réformes impulsées par une majorité parlementaire socialiste ; un courant révolutionnaire qui, sans rejeter a priori les réformes (déjà en 1848, en annexe du Manifeste, Marx pose une série de revendications concrètes immédiates, dont l’abolition du travail des enfants), mais ce courant considère que le passage au socialisme se fera par l’action politique organisée et indépendante de la classe ouvrière.

Une réforme peut cependant être un enjeu de la lutte de classes. Ainsi en est-il de la revendication de la réduction du temps de travail. Elle a, de tout temps et en fonction du contexte économique ambiant, été le moyen réclamé par les travailleurs et leurs organisations pour améliorer leurs conditions de vie et de travail ou bien une solution pour lutter contre le chômage. Pourquoi a-t-elle été et reste-t-elle un des enjeux de la lutte de classe ? D’une part, en raison de la très forte résistance de la bourgeoisie patronale belge à répondre à cette revendication ; ce qui a entraîné un retard important dans l’évolution de la législation belge en cette matière. Et d’autre part, le fait que la progression de cette revendication va de pair avec la reconnaissance du fait syndical et donc d’un rapport de force qui évolue favorablement en faveur des travailleurs. Le fameux aménagement des fins de carrière n’est-il pas aussi un enjeu de la lutte des classes mais dicté cette fois par le patronat et la bourgeoisie ? N’est-ce pas, en effet, la volonté patronale de faire travailler plus longtemps les salariés et de remettre en cause la réduction du temps de travail en comptant sur l’ensemble de la carrière ? En France, la droite a remis en cause les 35 heures légalisées par la gauche, à la grande satisfaction du MEDEF (organisation patronale française).

Avec l’évolution du capitalisme et plus particulièrement la concentration capitaliste que Marx va abondamment décrire dans son œuvre, bon nombre d’entreprises vont progressivement disparaître, la plupart s’intégrant dans des ensembles plus importants, plus complexes. Le siège n’est plus nécessairement dans la région. Les rapports de classes changent ; la classe ouvrière qui s’est dotée d’organisations puissantes va s’attacher à les faire reconnaître. Ses luttes ne sont plus seulement sociales ; elles sont aussi politiques. Des grèves générales très âpres sont menées pour obtenir le suffrage universel…

Quelques repères historiques :

La révolte des esclaves (Spartacus) : 73 avant JC ; soldat fait prisonnier de guerre ; gladiateur ; parvient avec quelques dizaines d’autres gladiateurs à s’enfuir ; se réfugient sur les pentes du Vésuve ; s’organisent pour survivre et s’armer ; sont rejoints par plusieurs dizaines d’autres gladiateurs ; razzias ; Spartacus convainc des petits paysans, des bergers de les rejoindre ; l’armée des « esclaves » comptent quelque 30000 hommes ; après plusieurs victoires importantes et avoir nargué l’armée romaine, Spartacus est tué les armes à la main en -71 ; la répression est sanglante : 6000 esclaves seront crucifiés sur la via Appia entre Rome et Capoue et 5000 autres massacrés dans le nord de l’Italie (cf. film de Kubrick en 1960 et roman de Koestler)
Les jacqueries : révoltes paysannes qui ont émaillés le moyen âge à partir de 1358 (Grande Jacquerie) et les temps modernes jusqu’à un peu avant la révolution française (1775). Les causes sont dues aux guerres (pillages, massacres,…), aux impôts exigés par la noblesse et le haut clergé, les deux sont souvent liés (on impose lourdement pour pouvoir financer les guerres), les pénuries qui entraînent la hausse des prix du grain,… Une de ces jacqueries dans Sud Ouest de la France est celle des croquants (Jacquou le Croquant). Pourquoi Jacquerie ? Ca vient de jacque qui était une veste courte que portaient les paysans à l’époque.
Les Canuts : les Canuts étaient des tisserands à Lyon. Ce sont des artisans qui travaillent chez eux sur leur propre métier à tisser pour des soyeux (marchands de soie). 1831 Ils gagnent 18 sous pour 15 h de travail. Le métier Jacquard va avoir plusieurs conséquences pour les canuts : devoir changer de logement (Croix Rousse – voir photos) ; augmenter la productivité des artisans qui sont toujours payer au même tarif. Il font appel au préfet qui crée une commission paritaire et fixe un prix minimum. Mais le préfet est désavoué car il a enfreint la loi Lechapelier qui interdit toute association d’ouvrier. Les soyeux sont réticents à faire des concessions sous prétexte de la… concurrence internationale et des contraintes du marché. Les canuts font alors grève, réprimés (+ de 100 morts) ils descendent de leur quartier et occupent le centre ville avec la garde civile qui s’est ralliée à leur cause. Ils réfléchissent aux suites à donner à leur mouvement. Dans le Journal des débats, le 8 décembre 1831, Saint Marc Girardin, conseiller d’État, exprime la frayeur des classes possédantes face à la révolte des canuts, si nouvelle dans son principe : « La sédition de Lyon de 1831 a révélé un grave secret, celui de la lutte intestine qui a lieu dans la société entre la classe qui possède et celle qui ne possède pas.. Notre société commerciale et industrielle a sa plaie comme toutes les autres sociétés ; cette plaie, ce sont les ouvriers. Point de fabrique sans ouvriers, et avec une population d’ouvriers toujours croissante et toujours nécessiteuse, point de repos pour la société [...]. Les barbares qui menacent la Société ne sont point au Caucase ; ils sont dans les faubourgs de nos villes manufacturières ». En 1834, de nouvelles baissent de salaires entraînent de nouvelles grèves. La révolte va être violemment réprimée par Thiers, un orfèvre en la matière. Le sacrifice des Canuts n’aura cependant pas été vain car leur mouvement va provoquer une brèche dans la loi Lechapelier, la coalition des ouvriers sera permise (jusqu’en 1849 date où elle sera de nouveau interdite) ; elle le sera définitivement à partir de 1864. »

La Commune de Paris : elle se passe en 1871 à Paris. Ici il ne s’agit plus d’une révolte mais d’une insurrection. C’est-à-dire que le mouvement va plus loin que la simple révolte : il y a une véritable prise de pouvoir et tentative de renverser l’ordre établi en apportant des réformes en profondeur. A l’époque, l’armée Française de Napoléon III s’est fait balayer par l’armée prussienne qui encercle Paris. Les parisiens refusent la capitulation et s’opposent à ce que le gouvernement désarme Paris. Une partie de la troupe se range du côté de la population. Le gouvernement présidé par Thiers quitte la capitale pour Versailles et s’arrange avec l’ennemi. Désormais ce ne sont plus les Prussiens qui vont encercler Paris mais les troupes françaises. Les insurgés vont s’organiser. Ils procèdent à des élections, réfléchissent à des mesures visant à l’égalité des sexes, pour améliorer les conditions de travail, laïciser l’enseignement,… Les versaillais auront finalement raison de la commune après une dernière semaine de combat de rue, les derniers combattants sont fusillés au cimetière du Père Lachaise.

1886, révolte sociale : à l’époque, les grévistes, surtout dans les charbonnages et l’industrie du verre se sont attaqué à des cibles bien précises, matérielles : on a incendié des ateliers, les propriétés des riches. La répression a été très dure. Dans la région de Charleroi et à Roux en particulier une fusillade a laissé sur les pavés une bonne dizaine de victimes. En 1886, le Parti Ouvrier Belge a tout juste un an. Il est surpris par ce mouvement de révolte très violent, violence désespérée des ouvriers qui répond à la violence délibérée des patrons qui se caractérise, elle, par des conditions de travail épouvantables et des salaires de misère. Ces grèves qui firent 21 morts dans la région de Charleroi, 2 dans le Borinage marquent un moment charnière dans les rapports sociaux. Elles auront des résultats positifs. Il est intéressant de prendre connaissance de la déclaration du 1er Ministre de l’époque, le catholique Beernaert : « … Ce que les excitateurs ne disent pas aux malheureux ouvriers qu’ils égarent, c’est que s’ils souffrent, le sort du capital n’est pas meilleur que le leur ; depuis quelques années, il est en quelque sorte mis à la disposition du travail. »

Mais d’autres vont prendre conscience que des réformes sociales sont indispensables. Même dans son discours du trône, le 9 novembre 1886, Léopold II déclare que « Peut-être a-t-on trop compté sur le seul effet des principes, d’ailleurs si féconds, de liberté (il faut comprendre liberté d’entreprendre pour les capitalistes bien sûr, ce qui est évidemment différent de la liberté d’association pour les travailleurs qui sera reconnue progressivement grâce au rapport de force qu’exerceront les travailleur) Et le roi continue : « … Il est juste que la loi entoure d’une protection plus spéciale les pauvres et les malheureux. » Une « Commission du Travail » est créée. Le temps des premières lois sociales est venu grâce à ces luttes et au sacrifice de ces travailleurs, notamment :
— l’interdiction du travail des enfants de moins de 12 ans,
— l’interdiction du travail de nuit aux femmes et des travaux souterrains de mine aux femmes et aux enfants, (rappelez vous Germinal de Zola)
— l’assurance obligatoire des ouvriers contre les accidents de travail à la charge des employeurs, (auparavant un travailleur accidenté ne pouvait espérer une aide qu’à travers la charité des dames patronnesses, à condition évidemment de ne pas s’être distingué comme un agitateur)
— l’interdiction du paiement des salaires en nature,
— la généralisation du système de caisse de prévoyance,
— la reconnaissance légale des unions professionnelles,
— la création de conseils de conciliation, (précurseurs des commissions paritaires)
— la propagande en faveur des société de secours mutuels,…

En conclusion, le mouvement social de 1886 a forcé les premières avancées dans le domaine de la protection des travailleurs et les premiers pas dans la reconnaissance des organisations de défense des travailleurs

Le XXe siècle :

Toute lutte sociale est une lutte politique dans la mesure où quels que soient les objectifs de départ, le résultat de la lutte aura des incidences politiques plus ou moins importantes, plus ou moins rapides : une décision politique, la mise en cause du pouvoir, une évolution dans le rapport de force avec le patronat, la poursuite du mouvement d’une autre façon,…

Le politique, le social et l’économique sont étroitement liés. Il n’est pas concevable qu’une action ne soit que sociale, que économique ou que politique, même si au départ le caractère politique est plus ou moins déclaré.

Quelques exemples épinglés depuis un siècle

1893, 1re grève politique en Belgique. Pour le suffrage universel. Le parlement à dominante catholique a refusé le SU, le POB (créé en 1885) lance le mot d’ordre de grève général pour impliquer le mouvement social dans cette lutte. Au final, le SU n’est pas accordé mais une avancée importante est obtenue : le suffrage plural qui permet à tous les hommes d’avoir au moins une voix (en fonction de la fortune, des études certains électeurs peuvent avoir plusieurs voix. Auparavant seul les hommes fortunés pouvaient voter ‘suffrage censitaire’). Cette évolution, même partielle, permet aux socialistes de se renforcer au parlement et les années suivantes, des conquêtes sociales vont être obtenues (1res lois sur les mutuelles en 1894, 1res lois sur les pensions de vieillesses en 1895, loi sur la protection de la rémunération en 1896).

1902, nouvelle grève pour le Suffrage Universel. Qui échoue. Le POB a été contraint par la base à lancer le mot d’ordre de grève générale ; la revendication n’est pas relayée par le groupe parlementaire qui tente de se rapprocher de la gauche libérale et ne veut donc pas la contrarier.

1913, troisième grève générale pour le SU. C’est un succès mais l’application de cette victoire est reportée en raison de la guerre. Le SU pour les hommes ne sera accordé qu’en 1919. Les femmes ne pourront voter elles qu’en 1948.

1932, grève dans les charbonnages. La crise de 1929 a des effets retards. La crise économique frappe évidemment surtout les ouvriers et plus particulièrement les mineurs. Le chômage augmente de façon catastrophique (1 % en 1928, 20 % en 1932 mais l’assurance chômage n’est pas obligatoire.) Sous prétexte de la crise, les patrons vont procéder à plusieurs baisses de salaires. La misère grandit (la classe ouvrière perd 30 % de son pouvoir d’achat), la famine s’installe dans certaines famille. La grève n’est pas décidée par les instances syndicales ; en mai, c’est un mouvement spontané, une révolte qui va partir du Borinage, gagner le Hainaut et particulièrement le Centre et enfin tout le bassin houiller jusque Liège. Les manifestations rassemblent des milliers de travailleurs avec femmes et enfants. Dans la région de Charleroi, deux jeunes travailleurs sont tués par la troupe qui par ailleurs va protéger la maison du peuple de Charleroi menacée par les grévistes. Les communistes très actifs dans la grèves sont accusés d’un complot commandité par Moscou ; l’accusation va bien vite se dégonfler. En septembre, le gouvernement fait quelques concessions : la révision des bas salaires et la stabilisation de ceux-ci jusqu’au 1er novembre, la création d’une commission chargée de réviser la convention paritaire sur les salaires, la garantie du réembauchage de l’ensemble des mineurs dans le Borinage et une augmentation de tous les salaires de 1%.

1936, montée du nazisme, front populaire en France. Le front populaire en France soulève beaucoup d’espoir chez nous. L’union de la gauche sur le plan politique est soutenue par un mouvement social très actif qui va obtenir un certain nombre de conquêtes importantes. Les travailleurs de chez nous ne vont pas être en reste. Ils obtiennent du syndicat qu’il soutienne un mot d’ordre de grève générale qui va durer quasiment tout le mois de juin. ½ million de travailleurs vont se mettre en grève dans toutes les régions du pays. Les résultats seront à la hauteur de la mobilisation : Réadaptation des salaires avec minimum de salaire de 32 francs par jour ; la semaine des quarante heures ; la reconnaissance syndicale ; les congés payés.

1950, la Question royale. Le mouvement est essentiellement politique mais le pays, du moins dans la partie francophone, va se mettre à l’arrêt. Grèves, manifestations vont prendre un tour insurrectionnel. La raison du mouvement, c’est le retour du roi Léopold III dont le comportement pendant la guerre a été jugé collaborationniste par la gauche. Le mouvement est d’ailleurs essentiellement encadré par la FGTB, le PSB et le PCB. Le mouvement obtiendra l’abdication de Léopold au bénéfice de son fil Baudouin. Au cours de sa prestation de serment, les élus communistes vont crier Vive la république. Julien Lahaut accusé d’avoir poussé le cri sera assassiné quelques jours plus tard. Dans ce cas ci le mouvement a révélé le clivage entre la Flandre et la Wallonie. La crainte de voir éclater le pays a été fortement ressentie.

1960-61, grève générale contre la loi unique, fédéralisme et réformes de structure. Le gouvernement P.S.C.-libéral veut imposer au pays, une loi-programme d’austérité contenant un ensemble de dispositions fiscales, sociales et économiques applicables par arrêtés d’exécution. Le mouvement qui démarre dans les services publics communaux et aux ACEC de Charleroi va prendre de l’ampleur et se transformer en grève générale. C’est une grève politique dans la mesure où elle remet en cause la politique du gouvernement. Elle va, au fil du temps, porter une revendication très forte qui va déterminer l’avenir du pays et de ses institutions : le fédéralisme et les réformes de structures anticapitalistes. La conscience que le déclin économique de la Wallonie est en marche pousse André Renard à lancer ce mot d’ordre qui bien que critiqué dans un premier temps (fuite en avant et abandon progressif de la lutte contre la loi unique ?) va monter en puissance dans la FGTB et dans la gauche socialiste et communiste. Mouvement Populaire Wallon va naître peu après la grève ; c’est important car la revendication fédéraliste qui s’accompagne de celle de réformes de structures anticapitalistes a une connotation résolument à gauche ; elle n’est pas étroitement nationaliste ; elle apparaît comme la seule solution à terme pour maintenir une Belgique fédérale, et en son sein une solidarité entre les travailleurs du Nord, du Sud et de Bruxelles. Saboté par le PSB le MPW va rapidement disparaître mais la revendication fédéraliste est lancée. Elle va malheureusement échapper à la gauche et être reprise par la bourgeoisie qui va en faire une question essentiellement institutionnelle et abandonner évidemment le lien avec les réformes de structures anticapitalistes.

1966, grève à la FN – à travail égal salaire égal. 3000 travailleurs de la FN vont entamer une grève de 12 semaines pour revendiquer 5 frs d’augmentation de salaire et le principe de travail égal salaire égal. La grève a été lancée en février, par les femmes ; les ouvriers et les permanents syndicaux leur ayant demandé de reprendre le travail. Le mouvement va faire des émules aux ACEC, une manifestation rassemble 5000 personnes à Herstal. En mai elles obtiennent une augmentation de deux francs. Une commission pour l’égalité salariale est constituée. Leur plus grande victoire c’est surtout de s’être affirmée comme une force. Elles ne se laisseront plus faire. C’est une des actions les plus importantes dans l’histoire de l’émancipation féminine. On comprend que ces 5 francs revendiqués et ces 2 francs obtenus ont eu une portée politique énorme.

1967, Anglo-Germain. L’entreprise fabriquait du matériel ferroviaire qui s’exportait dans le monde entier. Ou presque puisque des commandes de la Chine n’ont pas été acceptée alors que l’entreprise était dite en difficulté. Les travailleurs ont contesté cette décision et décidé d’occuper l’usine jour et nuit. C’est la 1re occupation d’usine de l’histoire du pays. Pendant plusieurs semaines les travailleurs vont s’organiser pour assurer une présence permanente dans l’usine. Un vaste mouvement de solidarité va se manifester à travers le pays et même venant de l’étranger. Le 1er ministre VDB va accepter une invitation de la délégation (FGTB) et venir s’expliquer devant les travailleurs. Une première aussi. L’usine sera finalement fermée mais les travailleurs vont exiger que des mesures de reconversion soient prises à l’égard de la région étant donné le déclin industriel qui s’accélérait. C’est le début des zonings industriels. Comme quoi une grève économique a des implications politiques.

Paroles : quels sont vos souvenirs de grève ?

Ouvrières du monde (film) – débat

Action contre les exclusions du chômage.



Les commentaires des internautes

1 message1

Histoire des mouvements sociaux
posté le 8 janvier 2013 par Juju

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